12 novembre 2009

Le subtext: la magie opère vraiment!

Sugar, 2009
réalisé et écrit pas Anna Boden et Ryan Fleck


Comment déterminer quel film est mauvais ou non? Tout le monde peut répondre à cette question: Une belle réalisation, de bons acteurs, une histoire plaisante, des images délicieuses etc. C'est subjectif et malgré qu'il y ai un certains concensus sur la qualité d'un film, l'important demeure l'intérêt et la réaction que nous avons devant une projection. Mais ceux qui ont appris à écrire un bon screenplay savent qu'une histoire intense ne se résume pas à quelques scènes fracassantes ici et là souportées de juteux dialogues. Il en faut bien plus, sinon, nous tombons dans le simple spectacle. C'est peut-être déjà pas mal, mais il est possible de faire encore mieux.

Je m'arrêterai sur un élément qui me parle particulièrement et que beaucoup d'auteurs semblent oublier. Ou du moins, ils ne semblent pas y porter trop attention: le sous-texte. Cette portion d'un ouvrage de 150 pages est le lien entre trois éléments d'une production: la réalisation, le scénario et le casting. En d'autres termes, un film avec des personnages vraisemblables et particulièrement profonds, c'est le résultat de bons sous-textes épaulés d'un montage logique, de plans de caméra adéquats et de jeux d'acteurs précis.

Les Boden et Fleck oeuvrent maintenant depuis 2002 (leur premier short). Ils ont cette force particulière d'ajouter une profondeure additionnelle à leurs travaux. Ils savent écrire, réaliser et surtout guider leurs acteurs. Sugar et Half Nelson, leurs derniers métrages, proposent deux protagonistes aux dimensions multiples. En prime abord, dans Half Nelson, Dan Dunne,

Half Nelson, 2006
réalisé et écrit pas Anna Boden et Ryan Fleck


interprété par le talentueux technicien Ryan Gosling, est un jeune professeur blanc au volant d'une classe du secondaire d'une école pour noirs et hispaniques. Ayant le tout parfait contrôle de sa troupe par son énergie captivante et son intelligence évidente, il éprouve contre toute attente un problème de contrôle impreingé fortement en lui. Conséquemment, c'est sur cet aspect que Anna Boden et Ryan Fleck oeuvrent d'une si magnifique façon. Les scènes les plus délectables sont celles où Ryan Gosling joue son jeu. Ce comédien a cette façon de nous amener avec lui dans son univers intérieur. Ses conflits intérieurs, personnels et extra-personnels sont magnifiquement performés. Il n'a besoin que d'un regard, d'un soupir, d'un simple geste pour nous indiquer exactement là où il en est. Immersif!

Ensuite, pour ce qui est de Sugar, c'est sur un désir inconscient du protagoniste que nos deux auteurs/réalisateurs développeront cette même dimension. Ce sont encore une fois les gestes, les actions et les réactions du personnage principal, Miguel 'Sugar' Santos, interpété par Algenis Perez Soto, qui nous amène à entrer en relation très intime avec lui. Le fait que le personnage évolue dans un contexte exotique, ce qui entraine une incapacité à bien communiquer avec autrui, laisse beaucoup de place au «non-dit». Conséquemment, le beat et l'intrigue se construisent par l'entremises de ces instants. Le rythme est intéressant et nous tient en haleine d'une douce façon. Immersif!

Bref, dans la vie, il est souvent difficile de comprendre ce que quelqu'un a en tête lorsqu'il ne parle pas, mais il est possible de mettre des mots sur les mimiques. Parfois, les tics nous révèlent la solution. Mais plus souvent qu'à son tour, nous nous trompons. Le cinéma est avant tout une vulgarisation d'un événement complexe qui, dans la vie de tout les jours, serait floué par une réalité spacio-temporelle - d'autres facteurs complexifieraient aussi l'événement - impropre à la cinématographie. Les auteurs de Sugar et Half Nelson nous font vivre des événements compliqués par le biais du «non-dit» d'une façon simple et épurée. Ce sont sincèrement mes révélations de l'année. De minucieux et très talentueux réalisateurs.

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